" Bordel " organisé, l'éditorial de Jean-Emmanuel Ducoin dans l'Humanité de ce jour !
Le « bordel » çà s’organise.
C’est même à çà qu’on reconnaît l’esprit français. Dans son genre, Emmanuel
Macron aura réussi un bel exploit dans l’histoire sociale récente, que nous
mettrons pour une fois à son crédit. En quelques mois d’exercice, il a
reconstitué une unité syndicale qui n’avait plus été observée dans la fonction
publique depuis au moins dix ans. Ce mardi, les fonctionnaires sont donc dans l’action
à l’appel de la totalité des neuf organisations syndicales qui regroupent 5,4
millions de salariés des trois secteurs concernés (État, hospitalier et territorial).
Un évènement considérable, à la mesure du moment des enjeux. Et bien que leurs
revendications soient en apparence « catégorielles », elles
concernent chacun d’entre nous, ce qui nous permet d’écrire en toute conscience :
les fonctionnaires entrent dans la danse ! Pour le dire autrement, le
front « social » anti-Macron s’élargit. Mieux, les agents publics
montrent l’exemple de l’unité, en quelque sorte, d’autant qu’il ne s’agira pas d’une « simple »
journée de grève et de mobilisations afin de réclamer l’ouverture d’ « une
véritable négociation salariale », mais bien d’un mouvement large pour
défendre – en général – l’avenir des services publics, ce bien commun de tous,
à commencer par ceux qui n’ont rien ou si peu…
Les observateurs avisés l’auront
constaté aisément, ce 10 octobre arrive dans un paysage social pour le moins
particulier. Alors que les Français déclarent de plus en plus massivement « soutenir »
les grèves et les manifestations conte les ordonnances cassant le Code du
travail, beaucoup de syndicalistes, comme Philippe Martinez, espèrent voir l’émergence
d’une « journée unitaire » dans tout le pays pour « fédérer les
mécontentements ». Macron a peur d’une telle perspective. Et il a raison. Le
20 novembre le Parlement devrait ratifier « ses » ordonnances. D’ici
là, celui qui prétend avoir lu Ricœur pourrait découvrir à ses dépens qu’il n’y a
pas de démocratie quand il s’agit d’imposer aux citoyens l’injustice sociale. Il
est ainsi parfaitement démocratique de penser à toutes les ripostes. Et même d’organiser
ce qu’il nomme « le bordel ». Y compris dans la rue.
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