" Un vrai barrage ", l'éditorial de Patrick Apel-Muller dans l'Humanité de ce jour !
Non, cette campagne n’a pas été « folle ».
Elle a débuté et s’est conclue par la mise à l’écart de tous ceux qui, durant les dix dernières années, sont
responsables des difficultés que vivent les Français. Premier épisode, Nicolas
Sarkozy est sèchement recalé. Au deuxième, François Hollande, plombé par ses
reniements et un bilan désastreux, ne peut même plus se présenter. Son second,
Manuel Valls, est battu sans conteste lors de la primaire socialiste et s’abîme
dans les trahisons à répétition. Le dernier acte de ce big bang politique s’est
joué hier soir avec l’élimination de François Fillon sous l’effet conjugué des
affaires, d’un programme sauvagement austéritaire et des tristes souvenirs de
son passage à Matignon. Il a perdu l’élection que la droite jugeait imperdable.
Sur la scène du second tour, les deux formations qui avaient monopolisé le
pouvoir, LR et le PS, viennent d’être dégagées et entrent en décomposition. La bipolarisation
qu’elles voulaient instituer vient de périr sous nos yeux. Avec esprit de
suite, les Français ont montré leur colère, leurs recherches d’autres voies et
se sont massivement rendus aux urnes. Ils ont passionnément parlé politique,
ont hésité entre les scénarios et cherché qui leur permettait de changer de
cap.
Ainsi s’explique la formidable
percée de Jean-Luc Mélenchon, particulièrement marquée dans les villes
communistes où il arrive généralement et tête de tous les candidats. Elle ne
lui permet pas d’être au second tour mais elle ancre la gauche – que les
abjurations hollandaises auraient pu condamner à mort – sur sa face
antilibérale. Ce vote sera fécond pour l’avenir. Bien sûr, le total de la
gauche, tous candidats additionnés, est historiquement faible, mais combien de
ceux qui se sentent le cœur de ce côté-là ont-ils été abusés par le double –
voire triple – langage d’Emmanuel Macron qui ont cru par une habileté tactique
ainsi barrer la route à Fillon et, pire, encore à Le Pen ? Ils seront
nombreux à déchanter et à retrouver au fil des années leurs engagements
électoraux.
Aujourd’hui, la priorité est sans
hésitation de battre Marine Le Pen et son programme qui charrie la haine, la
division des habitants de ce pays, les discriminations, la guerre contre les
syndicats, la mise au pas de la culture, le mépris de la République…Le Front
national a prospéré sur les plaies causées par le libéralisme ou la crise
politique et a gagné un million de voix depuis la dernière élection
présidentielle. Lui barrer la route est un impératif dans treize jours. Mais le
combat devra se poursuivre en élisant des députés capables de résister à la
vague libérale et aux ravages dont se nourrit le FN. Et, demain, dans les
luttes du quotidien. Là sera le vrai barrage.
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