« Légitime débat », l’éditorial de Cédric Clérin dans l’Humanité de ce jour !
La France
est au ralenti. Hormis les travailleurs qui vivent un rythme effréné de la
lutte quotidienne contre le virus, beaucoup ont pris leurs marques dans un
univers ouaté, aux bruits sourds. Il semble que le président de la République
aimerait que cette atmosphère feutrée s’applique au débat démocratique. Avec un
Parlement atrophié, des assemblées locales vides, les initiatives citoyennes
confinées, la démocratie est déjà sous cloche. Emmanuel Macron ne souffre
pourtant pas que l’opposition émette la moindre remarque sur la gestion de la
crise ou les raisons pour lesquelles nous en sommes arrivés là. Les critiques
sont « irresponsables », dit-il. Pointer la pénurie de masques ou de
respirateurs que tout le monde constate, aux effets terrifiants, c’est déjà
trop. Alors interroger les causes ? Vous n’y pensez pas.
En effet,
l’hôte de l’Élysée étend désormais son argumentaire aux gouvernements
précédents. « Quand on vit quelque choses qui est inédit, on ne peut pas
demander aux gens de l’avoir prévu il y a dix ans. » Pardon, mais si. Si
le candidat à la présidentielle d’alors avait lu l’Humanité il y a trois ans,
il aurait appris de la bouche de l’urgentiste Christophe Prudhomme que « notre
système n’est plus capable de répondre à une banale épidémie de grippe ».
On savait donc.
Si,
constatant son erreur, il lit nos pages aujourd’hui, il y découvrira un
douloureux rappel : « À 63 reprises entre 2011 et 2018, la commission
européenne a recommandé aux États membres de l’UE de privatiser certains pans
du secteur de la santé ou de réduire les dépenses publiques en matière de santé »,
nous dit Martin Schirdewan, coprésident de la Gauche unitaire européenne au
Parlement européen. Cette politique libérale, dogmatiquement austéritaire en
Europe et en France et qu’Emmanuel Macron continue de soutenir, a une lourde
responsabilité dans l’incapacité du continent à faire face au coronavirus
aujourd’hui. C’est l’un des enseignements majeurs. Pour que « le jour d’après
ne ressemble pas au jour d’avant, comme ne cesse de le répéter le président, c’est
faire œuvre démocratique que de le dire.
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