LE BLOG DES COMMUNISTES DE ROMAINVILLE

vendredi 3 avril 2020

« Le don et l’impôt », l’éditorial de Sébastien Crépel dans l’Humanité de ce jour !



C’est l’un des paradoxes du moment. Dans ce point de bascule entre chien et loup, où même le président de la République se montre économe en certitudes sur ce qui subsistera du « monde d’avant » dans le « jour d’après », se dégagent plus nettement encore qu’auparavant les quelques principes inamovibles sur lesquels le gouvernement a réglé son action, et qu’il n’entend pas jeter aux orties malgré la pire pandémie du siècle.

Parmi ceux-ci, le stupéfiant épisode de « l’appel aux dons » du ministre de  l’Action et des Comptes publics pour financer « l’effort national » jette une lumière crue sur le véritable culte que ce gouvernement voue à la propriété privée – celle des plus riches, la précision va de soi. Comment expliquer, sinon, le choix de s’en remettre à une générosité incomparablement plus aléatoire, moins efficace et moins juste que l’impôt – c’est bien pour cela qu’il a été inventé –, plutôt que de revenir, même temporairement, même partiellement, sur la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) décidée au début du quinquennat . Et cela, alors même  que cet appel aux dons est en soi l’aveu du besoin urgent et vital des ressources dont on s’est privé. Tout au sommet de l’échelle des valeurs de ce gouvernement la défense du bien des riches prime donc en toutes circonstance sur les buts sociaux les plus précieux : la santé publique, la satisfaction des besoins essentiels ou même la relance d’une économie sinistrée comme jamais.

Les mêmes qui n’hésitent pas à nous bercer de promesses de nationalisations à venir de « nouveau capitalisme » à visage humain n’ont pas les mêmes audaces verbales quand il s’agit de parler de gros sous. Pendant qu’on « nationalise » en paroles seulement, l’action publique s’en remet dans les faits aux caprices de la volonté privée. Avec cet argent soustrait à l’impôt, la boucle est bouclée. C’est le stade suprême de la privatisation. Et celui, aussi de la comédie du « changement » jouée par ceux qui ont intérêt à ce que rien, au fond, ne change vraiment, comme dans le Guépard, de Lampedusa.

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