Les communistes ont récemment rencontré les locataires du bâtiment J6 de la Cité Marcel Cachin. Ils nous avaient invité pour nous faire part de leurs inquiétudes, au fur et à mesure que s'approche l'heure de devoir quitter leur appartement.Au cours de cet entretien, nous avons ressenti le besoin
qu ’ils avaient de se confier, d’être écoutés et entendus. C’est ce que nous avons fait avec attention. Leurs témoignages étaient tout à la fois empreints d’une profonde colère mais aussi d’une angoisse bien difficile à dissimuler. Revenons à leur récit. Le 19 janvier 2009, ils reçoivent un courrier les informant que leur escalier allait être «
déconstruit », et les invitant à une rencontre. Dix jours plus tard, le 29 janvier, l’
OPH leur indique avoir pris connaissance de leur souhait « d’obtenir un logement de type F3 dans les bâtiments neufs avenue de
Verdun ». Le 3 novembre, ils sont invités à visiter un logement sur ce site, le 18 novembre. Puis, dans un autre courrier, daté du 5 novembre ils sont sollicités pour visiter un logement témoin au 99 rue Saint Germain, le 17 novembre. C’est par téléphone,
qu’au début de l’année 2010, il leur est proposé un logement de type F2 au 99 rue Saint Germain. Proposition
qu’ils ont refusé. Depuis, plus aucune proposition ne leur a été faite et ce n’est pas leur récente rencontre à l’
OPH qui les rassure. Imagine
t-on ce que peut être le désarroi d’une personne de 86 ans, disposant d’un appartement de 89m2 , dans une cité où elle a passé la moitié de sa vie, et qui devrait se séparer d’une partie de ses biens et de ses souvenirs ? Est-il anormal
qu’elle souhaite disposer d’une douche comme c’est le cas
aujourd’hui ? Nous sommes évidemment bien loin des discours et des écrits apaisants des élus de la majorité municipale, présentant ces déménagements forcés comme «d’ immenses bonheurs » pour celles et ceux qui les ont vécus. On trouvera des locataires satisfaits de leur relogement. Mais pensons un instant à ceux qui ont quitté
Romainville parce
qu’ils n’avaient pas d’autre choix ? Nombre d’habitants entretiennent avec ce qui a été leur lieu de vie pendant des décennies un rapport ambivalent, oscillant entre l’envie d’en partir et l’attachement à un morceau de leur histoire. Et lorsque arrive le moment de le quitter, c’est ce dernier sentiment qui l’emporte. En tout état de cause, un principe doit être respecté pour les locataires du bâtiment J, comme pour tous ceux concernés par les «
déconstructions » :
Ni augmentation de loyer, ni diminution des surfaces. Ce n’est pas le cas
aujourd’hui. Pour un loyer identique on propose un logement de 40 m2 au lieu de 89 m2. Et puis l’inquiétude ne concerne pas seulement les locataires qui doivent déménager. Si, au départ les habitants de
Cachin ont plutôt adhéré au principe de cette rénovation urbaine, ils n’avaient pas forcément intégré l’idée
qu’un tel projet, avec la destruction de 423 logements, s’inscrivait forcément dans le long terme. Ils prennent conscience que ce chantier permanent risque de durer encore de très nombreuses années. C’est difficile à vivre dans son quotidien. Par ailleurs cette opération devait aboutir à une «
dédensification », mais les espaces libres se trouvent réduits.
Etait-il donc opportun d’implanter la
médiathèque au cœur de la cité ? Ces questions sont dans les têtes. Qui ne les a pas rencontrées ? Comme quoi, il ne suffit pas de s’occuper d’aménagement, d’urbanisme et des façades, il faut davantage penser aux gens qui sont derrière : des jeunes, des femmes, des hommes avec leurs souffrances et leur mal vie. Soulager une détresse, une solitude, refuser l’inacceptable. S efforcer d’écouter l’autre en le respectant, d’être utile et efficace pour répondre aux problèmes tels
qu’ils se posent : C’est ainsi que les communistes et, beaucoup d’autres avec eux, conçoivent leur action politique. Nous en terminerons par un clin d’œil. Peut-être, vous arrivera
t-il, d’ici le 14 mars, de croiser un dimanche matin sur le marché, le premier des responsables socialistes de
Romainville ? Si c’est le cas, évoquez avec lui, le désarroi de ces personnes
qu’on « déménage », le non respect par la direction de l’
OPH de ses devoirs, l’absence de toute dimension humaine dans ses rapports avec les locataires. Il vous écoutera poliment, puis vous dira, avec détachement « Je vous laisse, je vais faire de la politique ». Comme nous, vous resterez sans voix, déconcertés par cette pensée, au terme de laquelle « faire de la politique » et « s’occuper des problèmes que rencontrent nos concitoyens » seraient deux choses totalement distinctes. Fort heureusement cette conception de l’action politique a pris quelques rides. Et innocemment, nous la croyions dépassée.
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